Bâtiments tertiaires : Vers une meilleure maîtrise du chauffage en France grâce à la réglementation

Bâtiments tertiaires : Vers une meilleure maîtrise du chauffage en France grâce à la réglementation

La hausse des prix de l’énergie a provoqué un boom des ventes de thermostats, mais les fabricants considèrent que la France n’est pas encore suffisamment équipée en dispositifs permettant de contrôler le chauffage ou l’éclairage pour réduire les factures. Ils misent donc sur la réglementation pour encourager les consommateurs à économiser davantage.

Un décret pour orienter les changements
Le décret BACS (Bâtiments Automatisation et Contrôle des Systèmes), relatif aux systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments tertiaires, a été publié au Journal Officiel du 8 avril 2023. Ce décret étend la portée des bâtiments concernés par cette mesure, incluant ceux dont la puissance nominale est supérieure à 70 kW à partir de 2027.

Le décret cible principalement les bâtiments non résidentiels tels que les grands bureaux, les commerces et les locaux professionnels, mais les logements devraient également être concernés par la suite.

Ces mesures ont été adoptées suite à l’hiver dernier, qui a montré que des actions simples telles que l’extinction, la réduction ou le décalage des appareils permettaient de réaliser des économies, mais étaient insuffisantes. En effet, la consommation nationale a baissé d’environ 13% pour le gaz et 9% pour l’électricité par rapport à la normale.

« Nous avons fait le plus facile, mais nous pouvons faire deux fois plus avec des solutions de pilotage et en programmant les bâtiments », explique Delphine Eyraud, déléguée du Gimelec, groupement réunissant 200 fabricants de technologies électriques et numériques pour les grands bâtiments.


Un potentiel d’économies d’énergie de 30 %
Selon Gilles Mailet, président de la CAPEB (Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment), durant le premier confinement en 2020, la consommation aurait dû chuter considérablement dans les bâtiments, puisque tout le monde travaillait à domicile. Cependant, la baisse n’a été que de 30%, ce qui montre que les gestes écologiques seuls ne suffisent pas à réduire la consommation d’énergie.

Il est donc nécessaire de recourir à des solutions techniques supplémentaires pour obtenir des résultats significatifs. Pour Gilles Mailet, une chasse au gaspillage dans les bâtiments, basée sur des gestes techniques écologiques, peut générer un potentiel d’économies d’énergie de 15 à 30%.


La vente d’équipements en forte hausse
D’après l’alliance Ignes, regroupant des fabricants d’équipements pour le parc résidentiel et les petits bâtiments, les ventes de robinets de radiateurs et de thermostats à poser ou fixer au mur ont augmenté de plus de 40% au dernier trimestre 2022. Par ailleurs, un thermostat sur deux vendu était connecté.

Dans les grands bâtiments, les responsables techniques ont davantage acheté de centrales de mesure permettant de superviser les consommations grâce à des multicapteurs et un logiciel, avec une hausse de 17% en 2022 par rapport à 2021, selon le Gimelec.

Les ventes de systèmes de pilotage ont également connu une croissance significative (+25% au dernier trimestre 2022). Ces systèmes sont reliés à un serveur d’automatisation et de contrôle, permettant de programmer des consignes de chauffage en fonction des moments de la journée, de la semaine ou de l’année.


La France doit rattraper son retard
Le travail à accomplir pour combler le retard est immense. Seuls 6% des bâtiments tertiaires (bureaux ou commerces) en France de plus de 1 000 m² disposent d’outils de régulation modernes et fonctionnels pour le chauffage, la ventilation ou l’éclairage. En 2018, seulement 12% des logements privés étaient équipés de solutions de programmation ou de régulation. Pourtant, ces bâtiments représentent « plus de 70 % » de la consommation électrique française un jour d’hiver, selon RTE.

Avec les nouveaux décrets, l’objectif est d’obliger les plus grands bâtiments à s’équiper d’un système d’automatisation et de régulation de la chaleur avant 2025, soit environ les bâtiments de plus de 2 000 m².

Les bâtiments plus petits, d’environ 1 000 m², devront s’équiper avant 2027. Les dérogations possibles seront moins nombreuses et des inspections techniques seront obligatoires. Certes, cela aura un coût pour les entreprises, mais avec des prix de l’énergie élevés, le retour sur investissement pourrait être rapide !


Les recommandations de la filière électrique
Puisque les secteurs résidentiel et tertiaire restent les plus énergivores, il est essentiel que « les gestes de sobriété dans les bâtiments s’ancrent dans les habitudes en hiver comme en été, y compris pour éviter les effets rebonds », rappellent les acteurs majeurs de la profession. Ils présentent ainsi leurs 5 recommandations pour massifier et ancrer la sobriété comme levier pour atteindre les objectifs de décarbonation :

  • Améliorer le taux d’équipement des bâtiments en solution de pilotage et systématiser le recours à des professionnels pour optimiser les performances (généraliser la mise en place de plans de sobriété, intégrer systématiquement un « lot pilotage/smart du bâtiment », favoriser le recours au commissionnement…)
  • Intégrer la sobriété dans les aides financières (CEE, programme OSCAR, MaPrimeRénov’…)
  • Sensibiliser aux écogestes techniques pour ancrer la sobriété d’hiver et d’été dans les pratiques (campagne de communication, guides de bonnes pratiques…)
  • Introduire la sobriété d’été et d’hiver dans le DPE pour matérialiser l’existence des solutions capables d’agir pour consommer moins et mieux
  • Encourager les bâtiments à devenir une réserve de flexibilité pour le système énergétique (incitation économique, culture de la puissance, stockage…)

En bref, la France doit impérativement rattraper son retard en matière de régulation et de pilotage des systèmes de chauffage, de ventilation et d’éclairage, notamment dans les bâtiments tertiaires. Les mesures réglementaires, associées aux efforts des professionnels et à une meilleure sensibilisation des consommateurs, devraient permettre d’atteindre des économies d’énergie significatives et de contribuer à la décarbonation du secteur.

Source : opera-energie.com

Total
0
Shares
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Précédent
L’industrie sidérurgique européenne face à la transformation écologique
L'industrie sidérurgique européenne face à la transformation écologique

L’industrie sidérurgique européenne face à la transformation écologique

L'industrie sidérurgique européenne est confrontée à une production en baisse, à

Suivant
Craintes des entreprises face à l’arrêt prévu des aides à l’électricité
Craintes des entreprises face à l'arrêt prévu des aides à l'électricité

Craintes des entreprises face à l’arrêt prévu des aides à l’électricité

La fin des subventions pour les coûts de l'électricité, prévue pour fin 2023,

Vous devriez aimer également
Total
0
Share